La folie c’est drôle jusqu’à ce que les fols en parlent.
La folie c’est très sérieux sauf quand les fols en parlent.
La folie ça se voit direct mais pas si les fols le disent.
La folie ça ne se voit pas à moins qu’il faille un bouc émissaire.
La folie c’est beau uniquement si les fols sont malheureuxses dedans.
La folie c’est émancipateur et passionnant pour toustes excepté les fols.
On pourrait continuer cette liste si longtemps, que la seule raison qui nous fait arrêter c’est qu’on est à cours de connecteurs logiques, vu qu’apparemment, la folie avait décidé qu’il ne fallait pas mettre deux fois le même. Va comprendre. En vrai, je devrais pas le dire. Ne pas dire aux non fols comment la folie dicte les règles jusque dans la grammaire. Ça nous amuse toujours qu’on nous dise qu’on écrit trop bien pour être fou alors qu’on est littéralement criblé de consignes aussi absurdes qu’impossible à enfreindre. Mais c’est pas le sujet. Ou alors si.
Comment on parle d’une chose si intime que la folie quand le monde entier en a fait un business ?
Comment on gagne sa vie en étant fol quand nous par contre on n’a pas le droit de vivre dignement ?
Comment on survit avec la folie quand on perd nos droits et notre humanité dés qu’on la nomme ?
Comment on s’épanouit dans la folie quand on nous répète encore et toujours qu’on est, qu’on doit être, malheureux et misérables ?
Je sait pas. Nous non plus.
La silenciation, le deux poids deux mesures.
Que les fols souffrent, mais en silence.
Quand les fols parlent si librement, en en riant, en se donnant des clés de compréhension, ça fait mal aux vrais fols il paraît. C’est ce que nous répètent les non fols, en bons petits flics de la psychiatrie. “Vous faîtes du mal aux vrais malades mentaux.” Et pour nous prouver leur bonne parole, se mettent à traquer les fols, les moquent, les humilient, les lapident en place publique, les isolent, les méprisent. Point made.
Que voulez-vous, la logique des non fols, j’y ai jamais rien compris moi.
Comment tu veux trouver ton chemin quand toutes les réponses sont mauvaises ? Quelles réponses tu peux trouver quand toutes les injonctions sont contradictoires ? Comment tu peux espérer te construire quand on cherche à démolir tout ce que tu es ?
Si les non fols font des oeuvres sur la folie, c’est inspirant, perturbant, révolutionnaire, passionnant, émouvant.
Si je fais des oeuvres sur ma folie, je surfe sur la vague, je profite, je manipule. On me traite de profiteuse.
Si les proches de fols parlent des fols, on les écoute, on compatit, on cherche des solutions. Les pauvres.
Si les fols parlent de leurs proches, on les punit, on les engueule. Bandes d’ingrats.
Et tout le temps partout comme ça.
Vous nous avez volé nos mots, nos angoisses, nos armures.
Vous nous avez pris la folie. Et vous nous punissez pour ça tous les jours.
Mon compte twitter est suspendu depuis cinq jours pour ce thread (encore visible sauf un tweet. On a fait appel mais les humains ont conforté la décision du robot, alors on a tout mis dans un article. Parce qu’on est têtu.). Dedans, on y parle de l’existence d’un antipsychotique fourni avec tracker digital. On était en colère, triste. Crise de rage et paranoïa. On parle de la violence du truc. De la psychiatrie comme un outil de contrôle. Et on fait le parallèle avec la situation actuelle. Depuis des mois qu’on baigne en plein crise covid, les blagues à base de “le vaccin injecte la 5G / une puce du gouvernement” tournent beaucoup. Coping mechanism comme un autre, vu la noirceur de mon humour, je serai mal placé pour juger. Le truc, c’est que pour beaucoup de fols, c’est pas des blagues. C’est des angoisses qui sont réelles. J’en fais partie. Dans le thread, on rappelle donc comment, même sans tracker digital, les fols sont drogués de force par la psychiatrie. Quel consentement éclairé quand si tu dis non on t’attache à ton lit, te prive de tes chaussures ou te menace de te faire perdre ton job (si ESAT) ou ton appart (si en résidence psy) ? Alors oui, y a des fols qui refusent le vaccin pour des raisons qui semblent complotistes, tout simplement parce que le rapport que la psychiatrie entre elleux et les médocs est un rapport de violence, de méfiance, de contrôle, pas un rapport de soin, de mieux, de protection.
Le tweet qui a été flag, c’est justement celui où je signale ce double traitement. Vous pouvez blaguer sur les vaccins qui injectent des puces gouvernementales et vous moquer des fols qui y croient pour de vrai. Mais le fait est que c’est réel.
Que j’ai mis des sources universitaires et journalistiques pour appuyer mes dires n’a rien changé. Tweet signalé. Pour propos complotistes.
Douce ironie.
Vous pouvez blaguer, mais nous n’avons pas le droit d’angoisser, de délirer. Et encore moins d’avoir raison.
La folie ça vous fait marrer jusqu’à ce qu’on vous prouve que c’est réel.
Les fols sont drôles jusqu’à ce que vous soyez obligés d’admettre qu’on a raison.
Ce jour-là, faut qu’on ferme nos gueules, ça écorcherait trop la vôtre de reconnaître vos torts.
Au pire on est des monstres, le ressors scénaristique d’un jeu ou d’un film d’horreur. Des gens sur qui cogner quand y a pas eu d’attentat depuis trop longtemps pour vendre de la peur aux JTs. Au mieux, on est des récits inspirants, des gens qui voient le monde si différemment que vraiment ça ouvre les horizons, c’est incroyable.
Les premiers on a l’habitude. On vous venir. On sait. Les deuxième, c’est plus vicieux. Vous croyez tellement être dans le bon camp que vous rendez même pas compte de la déshumanisation à tous les étages. Et on sait. On sait que le jour où on débordera un petit trop, ce sera fini.
-Tu permettras le traitement ou nous devrons t’éliminer.
-Vous allez me tuer ? Non. Je veux te l’entendre dire. Que tu vas me tuer si je ne les laisse pas me changer. Fabriquer un David plus simple. Plus propre.
Legion S02E08
Bien sûr que vous êtes pour l’inclusion. On sait. On la connaît la couleur de l’inclusion.
Vous voulez des schizos qui ne risquent pas de faire des crises.
Des handis qui n’ont pas trop besoin d’aménagement.
Des entendeureuses de voix qui ne parlent pas tout seuls.
Des paranoïaques raisonnables et rassuré·es.
Des neuroatypiques qui ne stimment pas trop visiblement.
Des systèmes sans trop d’alters et exclusivement humain·es et bien repéré·es.
Des autistes qui s’adaptent à tout dans la seconde et sans prévenir.
Des traumatisé·es sans trigger.
Vous voulez les fols sans la folie, parce que la folie c’est bien trop gros, trop dangereux, trop important pour être laissée dans les mains de gens pareils. Si et seulement si on accepte de laisser la folie derrière, alors vous accepterez les fols que nous sommes.
Comme si c’était un choix à notre portée.
Vous voulez la folie sans les fols, parce que c’est une histoire si croustillante, si belle et terrifiante à la fois. Vous y tenez à ce petit frisson qui coule dans la nuque. Cette impression de braver l’interdit quand vous approchez des limites de la raison.
Alors qu’au final tout ce que vous faîtes c’est griller un feu rouge à 3h du mat dans une bourgade de 50 habitant·es.
On est pas humain·e pour vous. Vous nous le rappelez à la moindre occasion.
C’est marrant comme ce thread c’était deux salles deux ambiances. Les fols étaient paniqué·es, réfléchissaient déjà à comment contourner le processus, comment niquer le tracker. Les non fols ont signalé un tweet, joué les surpris (alors que là aussi on prévient), puis ont fait notre procès comme quoi fallait bien que les schizos bouffent leur pilule. L’horreur que représente un tel procédé leur passant complètement au dessus de la tête, après tout, c’est que pour les fols non ?
Et ces gens si pleins de bonnes intentions qui veulent bien faire. Et qui viennent nous DM pour nous expliquer combien leurs proches schizos qui prennent pas leurs médocs sont insupportables invivables et pourrissent leur famille. Combien de fois on les a reçus ces DMs putain. Vous avez même pas conscience que vous êtes littéralement entre de décrire des gens exactement comme nous, ou qui pourraient l’être. Vous êtes en train de nous expliquer à quel point on est insupportable invivable et qu’on pourrit tout. Alors nous on est obligé d’enfermer Dand dans une boîte pour continuer d’avancer et faire la journée et répondre comme si vous veniez pas de nous poignarder dans le dos parce qu’il faut bien que quelqu’un défense votre oncle frère soeur ami·e parent contre ses proches qui lui veulent tellement bien qu’iels vont demander à un autre fou sa bénédiction pour les enfermer en HP sans leur consentement. Le tout avec Dand qui gratte et hurle et pleure dans le fond de la boîte, mais faut bien gérer.
Alors on gère.
Et on vous hait si fort.
Parce qu’à la fin on s’en voudra nous d’avoir osé la voix (les voix même dans notre cas), d’avoir osé s’énerver, de s’être battu pour nos droits et ceux des adelphes fols ALORS QUE VOUS VOULIEZ BIEN FAIRE HAHAHAHAHAHA.
Parce que comme chacun sait, droguer les gens de force, c’est pour leur bien. Mais bien sûr. Et c’est nous les dangereuxses inadapté·es, alors que vous refusez toujours de voir votre propre violence. Et que vous continuez de nous obliger à foutre Dand dans une boîte avec vos putains de demande à la con, tellement vous êtes plus préoccupé pour vous protéger vous que les fols.
So he’s a doctor and I am just a crazy little girl ?
Well he’s a doctor and you are just a crazy fucking bitch.
La folie c’est notre langue, notre armure, notre stratégie de défense.
La folie ça te prend tout, jusqu’à ce qu’il ne reste rien d’autre que la folie.
Et quand ce jour arrive, les non fols veulent te prendre la folie aussi.
Parce que finalement, c’est ça la plus grande delusion possible, le plus grand délire qui soit. De croire qu’on peut exister sans la folie. Que c’est un choix. Une possibilité. Et ce délire-là, c’est les non fols qui l’entretiennent. Parce que vous nous avez tellement déshumanisé, vous en avez tellement fait une histoire creuse et vide, que vous êtes infoutu·es de comprendre sa nature même. Infoutu·es de comprendre son rôle, son importance.
La vérité, c’est que la folie est une chose trop précieuse pour être laissée aux mains des non fols.
La vérité, c’est que vous pouvez report des tweets et nous obliger à les censurer, ça ne changera pas le fait qu’on a raison, et que ça finira par vous atteindre. Faîtes l’autruche si vous voulez, mais ayez la cohérence de nous épargner vos discours gluants sur la clairvoyance des fols.
La vérité, c’est que vous pouvez me DM encore et encore pour vous conforter dans l’idée que vous souffrez tellement plus que les fols autour de vous et à cause d’elleux, jamais vous m’entendez aller dans ce sens. Y a déjà bien assez de gens pour le faire. Des gens avec plus de soutien de force et de pouvoir que moi.
La vérité c’est que vous ne voulez la folie que si elle est instagrammable, et que si elle l’est, vous nous punirez pour ça. Parce que vous nous punirez toujours. Simplement parce qu’on existe. Et que notre existence même prouve que ce monde est dysfonctionnel, malade.
Les fols sont un symptôme, une conséquence. Nous sommes ce que le monde produit à force de violence, de dysfonctionnement, de rejet, de violence, d’injonction contradictoire, d’incohérence.
Vous pouvez le chercher encore et toujours le dérèglement chimico-hormonal.
Vous ne pouvez pas en semaine A vous extasier devant notre capacité à sentir les failles du monde, et en semaine B nous considérer comme pleinement responsable en blâmant une chimie défectueuse.
You can’t look away we are your mistake.
We’re generation doom.
Et puisque c’est la folie c’est tout ce qui nous reste, nous nous battrons pour elle. Pas par choix. Mais justement parce qu’on ne l’a pas le choix. Il n’y a pas de version de nous sans la folie. Cette possibilité a été perdue il y a longtemps. Je ne sais même pas si elle a jamais existé. Nous battre pour la folie, c’est nous battre pour nous-mêmes. Pour exister pleinement.
La folie est une armure
un mode de pensée
un filtre entre nous et le monde
un sens à part entière
une langue
une identité
Elle n’est ni bonne ni mauvaise en soi. Elle est.
De la même façon que l’absence de folie n’est pas bonne ou mauvaise en soi.
La folie n’est pas l’absence de santé mentale.
La santé mentale n’est pas l’absence de folie.
Nous battre pour sauver la folie, ce n’est pas faire les intéressants ou nous complaire dans la maladie mentale. C’est simplement embrasser ce que nous sommes, pour de vrai, dans toute notre complexité… et notre putain d’humanité.
Rendez la folie aux fols. Ou conséquence.